Le Musée des beaux-arts de Boston a décidé de former un chiot à la détection d’insectes susceptibles d’endommager des œuvres d’art. C’est une première
Il a les yeux couleur verveine, le pelage taupe argenté et une plutôt bonne bouille. Riley, un braque de Weimar de 3 mois, est surtout la nouvelle star du Musée des beaux-arts de Boston. Avec une mission bien précise: détecter les insectes susceptibles d’endommager des œuvres d’art. Il n’est pour l’instant qu’à la case entraînement. Mais si cet employé pas comme les autres parvient à remplir sa mission, Riley pourrait se targuer d’être le premier chien au monde à travailler dans un musée avec ce type de cahier des charges.
Cocasse? Pas forcément. Les responsables du musée, qui réussissent par ailleurs un formidable coup de marketing, admettent qu’il ne s’agit pour l’instant que d’un projet pilote, sans résultats garantis. Mais les braques de Weimar sont connus pour leur dextérité olfactive. Et si on associe généralement les chiens sniffeurs à la détection de drogues, d’explosifs, de cadavres, de faux billets de banque ou même de cancers, le rayon insectes a déjà été testé, avec succès. Les chiens entraînés à repérer des punaises de lit deviennent monnaie courante. Et au large de Los Angeles, dans les Channel Islands, un labrador a par exemple été formé pour lutter contre une espèce de fourmis invasive.
Reconnaître n’importe quelle substance
A priori, il n’y a donc aucune raison pour que Riley rate sa mission spéciale. Des chiens travaillent également dans la détection d’œufs de tortue. Ou d’excréments de jaguar. Chris Bugbee en sait quelque chose. Biologiste installé à Tucson, dans l’Arizona, cet herpétologue de formation s’est pris de passion pour les jaguars et a entraîné son berger malinois, Mayke, qui a raté son examen comme chien de gardes-frontières, à repérer des traces de félin. Un chien discipliné, avec un flair efficace, peut finalement être formé pour réagir aux odeurs de presque n’importe quels substance ou être vivant, avec un simple système de récompenses.
Au Canada, une hygiéniste industrielle travaille par exemple depuis 2005 avec des braques de Weimar pour dénicher des moisissures. Ils ont été entraînés en Floride, dans l’Académie canine de Bill Whitstine, spécialisée dans le domaine. L’hygiéniste promène ses chiens dans des écoles, hôpitaux ou entreprises, et intervient souvent après des travaux de décontamination pour s’assurer qu’il ne reste plus de traces de moisissures. L’expérience a toutefois ses limites, les chiens ayant de la peine à indiquer des traces qui ne se trouvent pas à hauteur de truffe.
La menace vient des visiteurs
Riley loge chez une employée du musée, Nicki Luongo, responsable de la sécurité. Elle a déjà, par le passé, entraîné des chiens policiers. Les responsables du musée se sont dit qu’elle serait à même de former un chien pour détecter la présence d’insectes nuisibles dans des matériaux en bois ou tissu. Voilà comment l’idée a germé. «Les discussions ont démarré en automne 2017, sur la meilleure façon de protéger nos collections», précise la porte-parole Karen Frascona. Les responsables du musée assurent qu’ils ne sont pour l’instant pas confrontés à ce fléau et que tout un protocole de mesures préventives est déjà prévu, y compris des mises en quarantaine d’œuvres d’art avant leur exposition, pour éviter ce genre de situation. Mais Riley serait une sorte de garde-fou supplémentaire, grâce à sa truffe que l’on espère toute-puissante. «Il devrait commencer à travailler dans environ un an, quand il aura fini son entraînement.»
La menace vient surtout du million de visiteurs que le musée – un des plus grands des Etats-Unis avec de très belles collections – attire chaque année. Des mites peuvent facilement se loger dans des habits puis décider de rester au musée. Riley ne sera pas directement confronté aux visiteurs, et ceux qui se précipitent au Musée des beaux-arts de Boston pour espérer le voir déambuler entre le D’où venons-nous? Que sommes-nous? Où allons-nous?de Paul Gauguin et La Petite Danseuse de quatorze ans d’Edgar Degas seront déçus: le chiot aux oreilles aussi larges que des escalopes aura droit à des visites privées. En dehors des heures d’ouverture.
Source de cet article : letemps.ch, Valérie de Graffenried
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